La Commission nationale consultative des droits de l'homme célèbre les 25 ans de la Convention internationale des droits de l'enfant ce 20 novembre et lance une série de films pédagogiques à destination des plus jeunes afin de les sensibiliser au respect des différences.

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Mis à jour le 3 janvier 2022

Entretien avec Christine Lazerges, Présidente de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH)

25 ans après la ratification de la Convention internationale des droits de l'enfant, où en est la France en matière de droits de l'enfant ?

La France a toujours été très attentive au respect de cette Convention dont elle s’est engagée à signer le 20 novembre le Troisième protocole établissant une procédure de communications individuelles. Celui-ci permettra à un particulier, un groupe de particuliers ou une association agissant en leur nom, d’adresser au Comité compétent des Nations unies une communication individuelle concernant une violation alléguée des droits de l’enfant. Une fois la ratification intervenue, nous l’espérons dans les meilleurs délais, c'est donc la saisine individuelle du Comité des Nations unies qui sera ouverte, comme pour les autres droits, ce qui contribuera à la cohérence du système international des droits de l’homme.

Pourquoi la CNCDH s'intéresse-t-elle autant aux droits de l'enfant et, au travers de ces films, au respect des différences ?

La CNCDH s'intéresse à l’accès aux droits de tous, de la naissance à la fin de vie. La CNCDH est d'autant plus attentive aux droits des personnes les plus vulnérables, dont bien sûr les enfants et les adolescents. Cela fait partie intégrante du mandat de la CNCDH, en tant qu’Institution nationale des droits de l’homme, accréditée par les Nations unies.

Le choix de décliner, à chaque épisode, le respect des différences s’est imposé à la CNCDH qui, en raison de son mandat légal de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, s’inquiète de la montée de l’intolérance dans la société. La CNCDH est ainsi particulièrement attentive à l’acceptation des différences comme une qualité et non comme un problème, premier moyen de lutter contre toutes les formes de rejet de l’autre et de racisme.

La notion d'intérêt supérieur de l'enfant est-elle suffisamment prise en compte par la société française ?

La question de l'intérêt supérieur de l'enfant est au cœur des préoccupations des pouvoirs publics et des membres de la CNCDH (notamment des ONG). Mais nous savons bien que cette notion est extrêmement difficile à définir, elle est très mouvante. Il faut comprendre que l'intérêt supérieur de l'enfant est à ré-interpréter dans chaque situation où la question se pose.

La CNCDH coproduit les films « Graines de citoyens » qui paraissent pour les 25 ans de la Convention internationale des droits de l'enfant. Tout enfant est-il une graine de citoyen ?

Oui, à condition d'éveiller les enfants à leurs droits, comme le proclame magistralement la Convention internationale des droits de l’enfant. La promotion et la préservation des droits tels que la CNCDH les porte et les défend passe nécessairement par l'éducation aux droits de l'homme. L'éducation au respect de l'autre doit débuter le plus tôt possible. . Cette série de films pédagogiques, qui met astucieusement en scène des graines, portent ce nom car en effet, dès notre plus jeune âge, nous sommes déjà cette graine de citoyen.

Propos recueillis par Michel Taube et Cécile Michiardi

Olivier Blond, auteur et scénariste des films de la série « Graines de citoyens », explique sa démarche pédagogique et poétique.

J'ai voulu aborder l'idée des droits de l'enfant en évitant le mieux possible le clivage "gentils" contre "méchants". J'ai même parfois poussé l'idée pour que ce soit le "lésé" qui entame une démarche de transformation. Car je suis convaincu qu'on peut changer beaucoup de choses par soi-même. Ce n'est pas le tout de savoir qu'on a des droits. C'est une démarche profonde, une réelle prise de conscience.  C'est le cas par exemple de Praline qui est victime de racket. C'est elle qui fait la démarche d'en parler. Cette action, cette volonté d’être un acteur à part entière me semblait importante. Ma volonté à travers ces petits films c'était donc de rendre acteurs nos graines de citoyens. Autrement dit, de ne pas les considérer comme des victimes mais bien comme des grands petits hommes dignes et responsables face à leurs droits et obligations.

Entretien avec le co-producteur Alexandre Hallier (La Générale de Production)

Vous co-produisez une série de films intitulée Graines de citoyens destinée au jeune public. De quelle manière cette série parvient-t-elle à éveiller la conscience citoyenne des enfants ?

Il fallait avant tout réussir à susciter un décalage, ne pas tomber dans l'écueil de la morale qui est, à mon avis, contre-productive. Les films introduisent un décalage poétique, notamment par le personnage récurrent du jardinier. Grâce à lui, qui vient semer une graine d'idée dans les rêves des protagonistes, la résolution du problème vient de la « victime » elle-même, et non pas d'une personne extérieure ou d'un adulte. En ce sens, cela témoigne de l'attitude responsable qu'il faut adopter face aux problèmes que l'on peut rencontrer.

Comment s'adresse-t-on à un jeune public sur des questions aussi essentielles mais souvent complexes telles que le respect de l'autre et des différences ?

C'est vrai que l'articulation du fond et de la forme a été le défi le plus difficile. Les droits de l' homme sont en effet plutôt conceptuels, abstraits et il nous fallait les « concrétiser ». C'est pourquoi, il était important de casser leur côté conventionnel. L'auteur et la réalisatrice ont réussi à créer un monde imaginaire tantôt absurde, tantôt poétique mais qui peut aussi correspondre à notre réalité. Il fallait trouver le bon équilibre entre véracité et exactitude : par exemple, on parle de « respect » des différences et non pas de « droit » des différences.

Quelle suite souhaitez-vous à cette série de films ?

Je tiens d'abord à souligner que les films sont en libre accès, libres de droits et donc accessibles à toutes et à tous. J'espère que leur vocation pédagogique trouvera un écho favorable dans le milieu de l'éducation mais ils peuvent tout aussi bien se regarder en famille ! D'ailleurs, les parents peuvent aider leurs enfants à la compréhension de ces films, en expliquant par exemple les jeux de mots, qui peuvent être difficiles pour des jeunes enfants. Notre intention est vraiment de susciter des débats entre enfants et éducateurs au sens large.

Propos recueillis par Cécile Michiardi

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