La CNCDH fait part de ses inquiétudes concernant le processus de réforme de la Cour européenne des droits de l'homme en cours et le contenu du texte proposé de Déclaration qui sera débattu au sommet de Copenhague.

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Mis à jour le 9 mai 2021

Du 11 au 13 avril se tiendra une conférence de haut niveau sur le système des droits de l’homme du Conseil de l’Europe à Copenhague, alors que la défiance des Etats parties à l’égard de la Cour européenne des droits de l’homme se renforce. Un projet de Déclaration a été élaboré en amont de cette rencontre. La CNCDH fait part de ses inquiétudes concernant le processus de réforme en cours et le contenu du texte proposé. Si elle est adoptée en l’état, la Déclaration remettrait en cause, au-delà de l’autorité de la Cour européenne des droits de l’homme, le caractère universel des droits de l’homme consacrés par la Convention européenne des droits de l’homme.

Depuis la création de la Cour en 1959, les Etats membres du Conseil de l’Europe ont adopté plusieurs Protocoles à la Convention européenne des droits de l’homme (la Convention) destinés à améliorer et à renforcer le mécanisme de contrôle établi par celle-ci. Depuis 2010, et face à l’encombrement persistant du rôle de la Cour européenne des droits de l'homme (la Cour), quatre conférences de haut niveau sur l’avenir de la Cour ont été organisées afin d’identifier les moyens de garantir l’efficacité du système de la Convention. Deux protocoles ont été adoptés dans ce contexte : le n° 15, qui introduit au sein du préambule de la Convention une référence explicite au principe de subsidiarité et à la doctrine de la marge nationale d’appréciation, et le n° 16 qui ouvre la possibilité pour les juridictions nationales de saisir la Cour pour avis.

Du 11 au 13 avril, la présidence danoise du Conseil de l’Europe réunit à Copenhague une conférence de haut niveau sur le système européen des droits de l’Homme dans l’Europe de demain. Un groupe de rédaction ad hoc a été mis en place au sein du Conseil de l’Europe pour préparer un projet de « Déclaration de Copenhague ». La première version du texte a été rendu public le 5 février dernier et a, depuis, suscité des réactions très mitigées de toutes parts.

Dans la perspective de la préparation de la conférence de Copenhague, le Gouvernement a saisi la CNCDH pour recueillir ses observations et commentaires sur le projet de Déclaration de Copenhague.

Malgré les évolutions du texte observées depuis février, la CNCDH considère qu’il est indispensable d’amender en profondeur le texte proposé. En l’état, la Déclaration contribue indubitablement à fragiliser la Cour. La souveraineté des Etats est mise en premier plan : la Cour n’apparaît plus comme la clef de voûte du système de la Convention, mais se trouve reléguée dans une fonction juridictionnelle amoindrie. Plus largement, le projet de Déclaration remet en cause l’universalité des droits de l’homme garantis par la Convention, en mettant en avant la marge nationale d’appréciation des Etats parties dans l’application de ces droits.

La CNCDH alerte sur les points suivants : 

  • Consécration de la « marge nationale d’appréciation » au rang de principe général d’application par les Etats des droits reconnus par la Convention, dénaturant ainsi un principe d’interprétation ponctuellement utilisé par la Cour. Dans le même sens, le projet de déclaration remet en cause le rôle de surveillance assuré par les juges européens sur le contrôle de proportionnalité exercé par les juridictions nationales à l’égard des restrictions apportées aux droits conventionnels. 
  • Tendance à la réduction du champ d’intervention de la Cour aux violations « graves et répandues » des droits de l’homme, encadrant encore davantage les conditions de recevabilité déjà restreintes depuis le protocole n°14.

Le projet de déclaration n’insiste pas suffisamment sur l’importance pour les Etats de respecter la jurisprudence de la Cour, en dehors des arrêts qui les mettent directement en cause : l’absence d’effet erga omnes des arrêts de la Cour n’empêche pas les Etats de s’inspirer de sa jurisprudence pour mettre leur droit et leurs pratiques en conformité avec la Convention.

En outre, même si le projet de déclaration a évolué sur ce point depuis sa première version de février, la CNCDH s’inquiète encore de ce qui pourrait s’apparenter à une immixtion du politique dans le juridique, et des risques de pression que les Etats membres pourraient exercer sur le juge européen à travers certaines préconisations relatives à leur « nécessaire dialogue ».

Les préoccupations et observations formulées par la CNCDH rejoignent en de nombreux points celles du réseau européen des INDH (ENNHRI).

Lire la note de la CNCDH sur le projet de déclaration et la position commune d'ENNHRI.

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